I) 1) Comment et pourquoi calculer l’heure ?

À l’origine, les premiers ordinateurs, comme la machine de Leibniz, n’étaient que des machines mécaniques.

Ainsi, ces ordinateurs ignoraient l’heure.

De même pour les premières calculatrices (1960-1975). On a dû attendre l’arrivée d’un « module horloge » (inclus dans l’écran pour l’hp-41), comme on le voit dans ce schéma :

Display-hp41

Puis, face au nombre croissant d’ordinateurs, on a décidé de les relier entre eux, afin de les faire communiquer, et d’échanger des fichiers, par exemple. Cette industrialisation et les avancées techniques posent un problème :

Supposons que deux employés soient devant leur poste d’ordinateur et que chacun veuille réserver le même billet pour une place de spectacle au même moment. Pour ne pas se retrouver face à un conflit, il faut savoir lequel des deux a réservé le premier. Il faut donc que la transaction soit datée, mais par une même référence, pour éviter ce problème.

Imaginons maintenant un autre problème à plus grande échelle : supposons que je fasse partir deux trains, l’un de Paris, l’autre de Berlin. Comment être certain qu’il n’y aura pas de collision ? C’est le premier problème sur lequel Albert Einstein a dû travailler, lorsqu’il a été embauché en 1902, à l’office des brevets de Berne. C’était l’une des premières grandes réflexions d’Einstein en rapport avec le temps.

Se pose, alors, la question de la nécessité de créer un temps de référence. Mais ce problème s’était déjà posé à l’époque des Grecs, lorsque deux scientifiques, l’un en Grèce, l’autre en Égypte, voulurent mesurer le rayon de la Terre, en mesurant l’ombre portée près d’un puits au même instant. Au XXème siècle, on a réfléchi sur la nécessité, et sur ce qui fait la nécessité, de mettre tous les ordinateurs à la même heure.

À cette question ont été données plusieurs réponses. Le télégraphe en est une. En Angleterre, par ailleurs, certains chercheurs ont  créé des montres qui s’écarteraient le moins possible de l’heure réelle. Puis est venu le début de la TSF : Transmission par radio http://dspt.perso.sfr.fr/Applications.htm

Évoquons aussi les horloges digitales. Les premières utilisaient la fréquence de 50Hz du courant EDF. On comptait 50 alternances  pour obtenir une seconde. Cependant, le courant EDF n’est pas très stable, et la précision de l’heure pouvait être faussée par un parasite industriel ou l’allumage d’une machine à laver.

Voici un historique des horloges digitales http://en.wikipedia.org/wiki/Digital_clock

Ce n’est que dans les années 1965 que l’on se pose la question de « quel temps choisir » ? Quelle est l’heure qui sera la même pour tout le monde ?

La première idée fut de calculer le temps moyen d’une journée. On commençait à compter à partir du moment où le soleil était au zénith, puis dès qu’il s’y trouvait à nouveau, on recommençait à compter. Cependant, cette méthode n’est pas précise : en effet, le temps qui s’écoule entre deux périodes où le soleil est à son zénith n’est pas le même tout au long de l’année. Cette courbe mathématique périodique, appelée analemme, représente le décalage entre le temps moyen et le temps réel.

Cette courbe est réalisée d'après la fonction : $R = \df

Analemme pour le méridien de Greenwich, réalisé en 2006

 

Pour tenir compte de ces variations les horlogers avaient déployé des trésors de d’imagination :

https://youtu.be/wc7tFRs_i6M

(3mn)

Les physiciens se sont donc opposés à cette méthode, qu’ils ont jugée trop subjective. Ils ont choisi la vibration du quartz comme référence. On a choisi le quartz, car il a la propriété d’osciller à une fréquence bien déterminée lorsqu’il est soumis à une tension. (les TPE sur Histoire de la mesure du temps ne sont plus accessibles depuis mars 2014)

QuartzDiapason Comme a été déterminé le kilogramme, unité de référence pour la masse, grâce à d’autres éléments (l’eau et la température), la seconde a pu être déterminée grâce à l’oscillation du quartz. Taillé à une dimension bien précise en forme de diapason, le quartz, soumis à un champ électrique, se déforme par effet piézoélectrique inverse (on utilise quotidiennement cette propriété dans les briquets électriques). On applique une différence de potentiel dans deux électrodes placées dans le quartz. Lorsque le champ est coupé, le quartz génère à son tour un courant électrique et reprend sa forme initiale. L’alternance de ces deux états va se stabiliser sur une des fréquences de résonance du quartz. Cette fréquence dépend essentiellement de la forme et des dimensions du quartz.
Si la première montre à quartz voit le jour en 1967, le premier oscillateur électronique stabilisé par un cristal de quartz fut réalisé en 1918.

 

oscillateur_quartz_7400

En haut à gauche du schéma ci-dessus, le quartz engendre une oscillation électrique représentée par la première ligne verte de l’oscilloscope (en haut à droite). Les 4 portes NAND sont des circuits logiques intégrés. On ne peut pas observer à l’œil le fonctionnement de ces petites boîtes noires. Tout au plus peut-on visualiser le signal qui entre et celui qui en sort.

73_BasculeD   À gauche, la figure  montre les signaux électriques tels qu’on peut les observer sur l’oscilloscope. On voit que la fréquence en sortie est moitié moindre que celle de l’entrée.

Le fonctionnement d’une montre à quartz est explicité, en 3mn30, dans cette vidéo en anglais. On peut avoir les sous-titres en français. http://www.youtube.com/watch?v=1pM6uD8nePo

Précédemment, l’observatoire de  Paris proposait « l’Horloge parlante » (la première au monde). En composant le 3669, on peut encore obtenir l’heure exacte. Voilà ce que l’on entendait :

(2mn30)

À l’heure actuelle, il subsiste encore entre les astronomes et les physiciens des divergences sur la  question du temps. Le temps universel fait l’objet de discussions parmi les scientifiques. Puisque les astronomes calculent le temps céleste et le temps terrestre, alors que les physiciens calculent la vibration du quartz (et maintenant du césium), on retire, ou on ajoute, parfois, une seconde au temps de référence.

C’est ce qui s’est produit en 2009 et qui est raconté dans ce court reportage (1 min) :

 

L’évolution de la technologie a fait que les physiciens ont décidé de calculer le temps « réel » à partir de la vibration de l’atome de césium, et non plus à partir de celle du quartz. Il est plus difficile de calculer la fréquence du césium, mais on sait que le césium est plus stable que le quartz (à cause de ses niveaux d’énergie). De plus, ce choix a été fait pour éviter un bon nombre des problèmes exposés plus haut. Enfin, toujours par le principe des bascules, on arrive à donner la seconde.

 

Mais alors, pourquoi cette volonté d’être si précisément à l’heure ? Finalement, nous sommes tous à des heures différentes, et il est très fréquent de voir que notre montre a 1 ou 2 minutes de décalage par rapport à l’horloge d’un d’autre. Cela fait appel à notre tolérance, c’est-à-dire que nous tolérons d’avoir 1 ou 2 minutes de décalage. Il est parfois impensable d’imaginer ne serait-ce que d’avoir 1 seconde de décalage : rappelons qu’en septembre 2011, des physiciens avaient cru trouver une particule plus rapide que la lumière. Lors de l’expérience, on a calculé la vitesse d’un photon. Entre l’ordinateur de Genève, et celui d’Italie, il faut une précision de temps bien supérieure à celle de l’ordre de la seconde.

Nous avons trouvé une conférence de 80 minutes sur ce sujet : La découverte du boson de Higgs au Cern

Ainsi, peut-on d’ores et déjà dire que tous les ordinateurs se mettent à la même heure grâce à un temps établi, le temps universel de référence. Cependant, si tous les ordinateurs étaient reliés à un même ordinateur, qui distribuerait l’heure, celui-ci ne pourrait plus répondre, face au trop grand nombre de demandes. (voir le deni de service).

On peut imaginer qu’un ordinateur donne l’heure à deux autres, qui la redonnent à deux autres, etc… Mais, cela implique un autre problème, qui est le délai de propagation de l’heure. La précision de l’heure est faussée, c’est pour cela qu’il a fallu chercher une autre solution. C’est la création du Network Time Protocol, dont nous parlerons beaucoup dans la suite de ce travail.

 

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